Avis du CCNE du 13 septembre 2022 : vers une aide active à mourir...
L'avis du Comité Consultatif National d'Ethique n°139 a rendu public un avis intitulé :"Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : Autonomie et solidarité" Cet avis revient notamment sur la possibilité d'un accès légal à une aide active à mourir, ouverte aux personnes majeures et sous certaines conditions.
Les débats sur la fin de vie ont toujours animé la société.
Un premier avis du CCNE (Avis n° 87) intitulé « refus de soins et autonomie de la personne»
en date du 14 avril 2005 avait posé onze recommandations.
La loi du 22 avril 2005 -Loi LEONETTI - avait posé un premier cadre légal sur la fin de vie:
Elle reconnaissait au patient le droit à la non obstination déraisonnable en toute situation et surtout en fin de vie.
Elle réaffirmait l’interdit de donner la Mort et caractère absolu.
La législation sur la fin de vie doit concilier plusieurs principes fondamentaux:
- l'interdiction de l’obstination déraisonnable.
-l'obligation pour le médecin de prodiguer des soins et de respecter la dignité du patient jusqu'à sa mort.
- Le respect de la volonté du malade.
- l'encadrement de la délivrance des médicaments à double effet et la prise en charge de la douleur.
Cette première Loi n'était pas suffisante et ne répondait pas à toutes les situations.
Le Président de la République en 2012 sollicitait le CCNE qui rendait un nouvel Avis N°121 « Fin de vie, autonomie de la personne, volonté de mourir »
Cet avis présentait l’état des réflexions du CCNE prenant en compte les évolutions de la loi et des pratiques au cours des dix dernières années au sujet des droits des personnes malades et des personnes en fin de vie.
Se posaient notamment les questions suivantes : les directives anticipées, la demande d’accompagnement ou suicide assisté et comment rendre dignes les derniers moments d’un patient dont les traitements sont interrompus ?
En 2013, l’avis citoyen sur la FIN DE VIE (daté du 14 décembre 2013) préconisait :
- Un aménagement de la Loi LEONETTI
- le développement massif de l’accès aux soins palliatifs – à ériger en cause Nationale :
- l' Amélioration de la formation initiale et continue du corps médical et augmentation des structures d’accueil.
- concernant le suicide médicalement assisté, la réponse est nuancée : le groupe s’y montre favorable en le considérant comme un droit légitime du patient. Un encadrement strict est recommandé, le suicide assisté n’étant envisagé que « pour les personnes en fin de vie ou atteintes d’un maladie incurable ou irréversible ayant manifesté leur volonté et dont la conscience est formellement constatée par un collège d’au moins deux médecins ». Il est également préconisé une exception d’euthanasie pour les patients en fin de vie, ne pouvant exprimer leur volonté encadrée plus strictement encore : soumise à l’accord d’une commission locale ad hoc qui devrait se réunir sous 8 jours.
Loi du 2 février 2016 – Loi CLAEYS – LEONETTI modifie le code de la santé publique en instituant notamment la sédation profonde et continue jusqu'au décès.
L'article L 1110-5-2 du Code de la santé publique permet : "
A la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas subir d'obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie et à l'arrêt de l'ensemble des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre dans les cas suivants:
1° Lorsque le patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ;
2° Lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une souffrance insupportable.
... Le recours à la procédure collégiale est institué si le patient n'est pas en mesure d'exprimer sa volonté.
Les nouvelles recommandations du Comité Consultatif National d'Ethique :
Le comité consultatif national d'éthique dans son avis N°139 de septembre 2022 pose plusieurs recommandations qui impacteront nécessairement la nouvelle législation sur la fin de vie annoncée fin 2023.
La 1ère recommandation est le développement des soins palliatifs en renforçant les mesures de santé publique.
Il convient de rappeler que les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage.
Le droit d'avoir recours à des soins palliatifs est un droit fondamental.
Le constat est celui de leur sous-développement en France.
La recommandation principale du CCNE porte sur l'Aide active à mourir.
Des critères éthiques devront être respectés : « la possibilité d’un accès légal à une assistance au suicide devrait être ouverte aux personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances physiques ou psychiques réfractaires, dont le pronostic vital est engagé à moyen terme. » (quelques semaines à quelques mois ??)
La demande d’aide active à mourir devrait être exprimée par une personne disposant d’une autonomie de décision au moment de la demande, de façon libre, éclairée et réitérée.
La décision de donner suite devrait alors faire l’objet d’une trace écrite argumentée et serait prise par le médecin en charge du patient à l’issue d’une procédure collégiale rassemblant d’autres professionnels de santé.
Les professionnels de la santé devraient pouvoir bénéficier d’une clause de conscience, accompagnée d'une obligation de référer le patient à un autre praticien en cas de retrait. Une telle loi, si elle était envisagée, devrait être évaluée régulièrement.
La 3ème recommandation est la nécessité d'un débat national nécessaire selon le CCNE.
Il conviendra de suivre l'actualité...
Les débats vont être conséquents comme à chaque fois que le législateur souhaite modifier le cadre légal.
La France va -t-elle suivre l'exemple de nombreux pays européens et récemment l'Espagne qui a légalisé l'aide au suicide et l'euthanasie par une Loi du 18 mars 2021 ?
Espérons une Loi en 2023.